Life Style

Le Noël particulier des lecteurs de « La Croix »



« Ce Noël-là à Nouméa, il vient d’arriver un bonhomme de neige de métropole »

♦ « Nous étions cinq enfants, chacun avait un petit mouton qu’il avançait tous les jours vers l’Enfant-Jésus de la crèche, pendant l’Avent. Mais, quand on était sots, les parents reculaient le mouton et c’était la pénitence. » Élisabeth R. (Montrouge, 92)

♦ « Noël à Nouméa dans les années 1960 se fête, pour nous, au bord de la mer car c’est l’été. Mais il vient d’arriver un bonhomme de neige de France. De la neige ! Je fais la queue avec les autres enfants pour toucher cette neige que je n’ai jamais vue. Déception : c’est dur et froid, un gros glaçon ! Le plus beau cadeau de Noël sera de la voir tomber du ciel des années plus tard. Merveille de légèreté et de silence transformant le plus gris des paysages en splendeur immaculée et des voisins tranquilles en redoutables et joyeux compagnons d’une mémorable bataille de boules de neige ! » Anne Richand

EXPLICATION. Pourquoi fêtons-nous Noël le 25 décembre ?

♦ « Pour moi qui suis née à la campagne en 1941, les Noëls d’antan étaient sobres et pourtant heureux. Ce matin-là, en 1946, l’installation de la crèche fut pour moi extraordinaire : en lieu et place des images pieuses qui symbolisaient la nativité (nous n’étions pas riches), trônaient tous les personnages et animaux de la tradition, un Enfant-Jésus, Marie, Joseph, le bœuf, l’âne, les bergers, les moutons dont le plus laineux portait à son cou un minuscule grelot qui tintait ! J’étais subjuguée. » Colette Mourey

♦ « Au sortir de la guerre, en 1945, j’avais 10 ans. Maman et moi étions allées à la messe de minuit. Après des années de couvre-feu, se retrouver dans la rue, la nuit, et rejoindre tout le monde à l’église, c’était déjà un rêve. Maman avait préparé une pâte à gaufres. Papa était chargé de surveiller la levée et de maintenir le feu dans la cuisinière. En rentrant, pas de repas festif ni de jouets, seulement la joie de trouver ma tante et mes cousins à la maison. » Colette Brault (Sèvres, 92)

« Comment ne pas me rappeler ce Noël passé dans une étable ! »

♦ « La guerre était finie. J’avais 8 ans. Nous étions rentrées d’Afrique, ma mère et ses cinq filles, pour rejoindre notre père, officier dans l’infanterie coloniale, en Bretagne. C’est le seul Noël avec lui dont je me souvienne. Je le revois construisant la crèche. Je regardais mais ne touchais pas. Les sapins de Noël n’existaient pas encore pour moi. Le soir du 24 décembre, je suis allée à la messe de minuit avec les grands. Elle était vraiment à minuit. C’était dur d’attendre. Les yeux se fermaient tout seuls. Le lendemain, dans les souliers mis devant la cheminée, il y avait deux paires de patins à roulettes pour les trois aînées. J’ai beaucoup aimé en faire. L’année suivante, en 1946, mon père est parti en Indochine où il a été tué le 20 novembre 1947. Il nous avait quittées sans nous dire au revoir. » Geneviève Beauchesne

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♦ « Pendant la guerre, la messe de minuit avait lieu à 17 heures à cause du couvre-feu. Avec ma famille, nous habitions une petite rue au bout de laquelle il y avait une clinique privée tenue par des religieuses. Une année, elles nous ont invités à venir dans leur chapelle privée… À l’heure dite, nous avons traversé la rue dans le noir et en silence ! Trois messes basses, c’était bien long pour une petite fille de 10 ans qui glissait avec ses bas de laine sur le prie-Dieu trop bien ciré ! Puis nous sommes rentrés pour aller voir ce que le Petit Jésus avait déposé dans nos chaussures alignées devant la crèche… Avant un réveillon joyeux. » Marie-Claire

♦ « Comment ne pas me rappeler ce Noël passé dans une étable ! J’avais 15 ans. Nos chefs scouts et notre aumônier nous invitèrent à fêter la naissance du Christ dans le petit village de Tanavelle, un lieu privé de messe de minuit depuis une vingtaine d’années. Renonçant aux festivités d’un Noël familial, nous fûmes une quinzaine de jeunes à nous préparer pour ce qui devint une véritable aventure. Partis à skis dans un mètre de neige, nous terminâmes notre approche du village en pleine nuit, dans un brouillard où seuls les poteaux d’une ligne électrique nous permirent d’arriver à bon port. Mais, une fois sur place, l’église du village s’est avérée impossible à chauffer. On s’est donc retrouvés dans une étable avec des dizaines de bœufs qui nous ont réchauffés de leur présence. Comment ne pas remercier la Providence de nous avoir offert pareil gîte, en ce jour à jamais ancré dans nos mémoires ! » Henri Forestier

♦ « En 2014, nous avons assisté par erreur à la messe de Noël en polonais, langue que nous ne parlions pas, mais que nous avons finalement assez bien comprise… Je me souviens des regards complices entre nous quand on a réalisé notre méprise puis avec nos voisins qui avaient, eux aussi, deviné. Le sourire et la gentillesse sont devenus ce soir-là une langue commune. Le signe de paix a été très émouvant. Ce fut un mini-voyage qui reste un très chaleureux souvenir. » Pierre Desmartin

« La messe de minuit était célébrée à la tombée de la nuit, pour ne pas attirer l’attention des bombardiers »

♦ « Dans le Nord, autrefois, les cadeaux n’étaient pas donnés aux enfants le jour de Noël mais à la Saint-Nicolas. La veille de ce jour, pendant la guerre, on m’avait demandé de déposer des carottes au pied de la cheminée pour son âne. Le matin du 6 décembre, les jouets étaient bien arrivés, déposés par saint Nicolas, qui avait récupéré les carottes. Mais quelle ne fut pas ma surprise quand j’ai retrouvé les carottes un peu plus tard dans une remise. On m’avait trompé ! » Hubert Ghestem

→ SÉLECTION.Noël 2021 : livres, jeux de société, DVD… notre sélection de cadeaux pour vos enfants

♦ « C’était le Noël de mes 8 ans, un Noël de guerre. En guise de cadeaux, nous recevions quelques fruits du terroir. Comme on ne trouvait pas de jouets dans le commerce, nous fabriquions des soldats de plomb grâce à un moule prêté par un copain. Nous ne manquions pas d’imagination. Dès début décembre, nous construisions la crèche avec de l’écorce des bouleaux qui jonchaient la terre. Grâce à une scie à déchiqueter, nous fabriquions des santons dans les chutes de contreplaqué achetées avec les pourboires d’enfants de chœur. La messe de minuit était célébrée à la tombée de la nuit, parce qu’il ne fallait pas attirer l’attention des bombardiers qui allaient en direction des villes allemandes. C’était un Noël pauvre mais riche de convivialité autour de jeux de société, en famille ou avec des amis qui nous rendaient visite. L’occasion d’apprendre que le bonheur ne s’achète pas. Il est le fruit du vivre-ensemble en harmonie et en paix. » Joseph Penrad (Saint-Avold, 57)

♦ « Noël 1931. J’ai 5 ans et je reçois un tam-tam et une poupée. Le soir, quand je vais me coucher, maman me dit : « Tu n’as pas été sage, le Père Noël va venir reprendre tes cadeaux. » Je suis étonnée mais pas inquiète. Dans ma petite tête, je pense qu’à Noël, il a bien du travail et pas le temps de venir reprendre des cadeaux. Mais le lendemain, il n’y a plus rien. C’est donc vrai. Maman, à la porte du salon, attend ma réaction. Je n’en montre pas. Je quitte la pièce en colère contre le méchant Père Noël. Je le hais. Les jouets sont revenus quelques jours plus tard. Mais je ne l’aimerai plus jamais. » Rolande Leger

♦ « En remontant dans mes souvenirs d’enfance, l’image du sapin s’impose à ma mémoire. Installé sur la maie, dans la cuisine, sa cime frôlait le plafond. Il était décoré de guirlandes, de boules fragiles, d’étoiles découpées dans du carton, de noix enveloppées de papier argenté ou doré… et de vraies bougies dans leurs minuscules bougeoirs en forme de pince. Elles n’étaient allumées qu’une seule fois, par prudence, avec les cierges magiques. L’illumination était notre adieu au sapin, à la fin janvier. Au pied, on déposait les cadeaux, le matin de Noël. Il fallait attendre que la famille soit réunie pour les ouvrir. Cette attente était une épreuve (et peut-être un apprentissage salutaire). Nous avions un jouet de l’usine où travaillait mon père. En 1959, j’ai eu une poupée noire en plastique avec des anneaux aux oreilles. Ce sont les adultes qui ont été les plus étonnés. Elle s’est très bien entendue avec ma poupée blanche. » Mauricette Bonnet (Saint-Étienne, 42 – Barbuise, 10)

« Cette année-là, en 1975, c’était la guerre à Beyrouth »

♦ « J’ai 8 ans. En ce matin de Noël 1949, je me réveille à l’Institut Saint-Pierre, hôpital des enfants de Palavas-les-Flots, et la première chose que j’aperçois dans la lumière du jour blafard, c’est la grande statue blanche de la Vierge qui trône au milieu du dortoir, entre nos petits lits. J’écarquille les yeux. La statue est illuminée par des dizaines de petites barrettes agrémentées de magnifiques nœuds de ruban rose. J’en oublie l’absence de ceux que j’aime et reçois le plus beau des cadeaux des mains de la religieuse qui accroche un nœud rose dans mes cheveux. Voilà maintenant des papillons roses qui voltigent dans le grand dortoir puis jusqu’à la chapelle où l’émerveillement se poursuit avec les chants de Noël. » Solange Soury-Lavergne (Corenc, 38)

♦ « C’était dans les années 1950. Notre mère venait de perdre ses parents, décédés en septembre, à deux semaines d’intervalle. Le deuil fut lourd à porter ; nous n’écoutions plus de musique jusqu’à ce soir de Noël où notre père déclara : « Maintenant, c’est fini » et, plaçant un disque sur l’électrophone, fit éclater les chants de Noël, Noël qui prenait alors tout son sens, Jésus nous apportait la Paix, la Joie ! » Odile

♦ « Cette année-là, en 1975, c’était la guerre à Beyrouth. On s’entretuait sans trop savoir pourquoi. Le soir de Noël, nous nous sommes réfugiés chez mes deux tantes, dans un quartier plus tranquille de la ville. C’était elles qui, traditionnellement, préparaient le réveillon et organisaient la distribution des cadeaux. Malgré la situation, elles s’étaient démenées pour nous offrir quelque chose. Elles avaient trouvé pour mon frère et moi un pull unisexe et un fichu, ainsi qu’un porte-monnaie pour les deux petites filles qu’elles hébergeaient aussi. Ce Noël est resté gravé dans ma mémoire et m’a longtemps rendu taciturne au moment des fêtes, parce que j’avais perçu chez ces deux grandes dames toute la tristesse de ne pouvoir faire mieux. Elles qui n’avaient plus grand-chose accueillaient les autres, y compris des inconnus pour partager le peu qu’elles avaient. Alors qu’aujourd’hui, bon nombre d’entre nous avons largement plus qu’il nous faut, nous rejetons l’autre parce qu’il est différent, inconnu. En repensant à cette époque, j’ai compris que Noël était un moment où, plus que d’habitude, nous devions ouvrir nos cœurs. C’est pourquoi avec ma femme et mes deux filles, dès que nous le pouvons, nous recherchons une personne seule pour Noël et nous l’invitons à partager ce moment de joie. » Laurent Fattal

→ CHRONIQUE. Y aura-t-il des Pères Noël à Noël ?

♦ « Angleterre, 1947. Un hiver terrible. De la neige partout. J’avais 5 ans et je sortais de l’hôpital après une appendicite aiguë, la tuberculose et la varicelle, simultanément. On avait prévenu mes parents que je ne survivrais peut-être pas. Ma mère avait perdu trois bébés avant moi. Pas question de sortir jouer dans ce merveilleux paysage glacé autour de la maison. Mon père est allé chercher un grand seau de neige. Je vois, je sens toujours cette neige entre mes mains. Puis ma mère m’a demandé de chanter un chant traditionnel de Noël… Depuis, je n’ai plus jamais été malade. » Andrew James

« Noël était pour moi la venue des grands-parents avec le cadeau rituel »

♦ « Quand j’étais petite, il y a longtemps, Noël arrivait sur la pointe des pieds. Il fallait faire bien attention car il n’y avait ni sapins enguirlandés dans les rues, ni décorations lumineuses, ni étalages somptueux. Mais un beau jour, on voyait apparaître sur les rares panneaux publicitaires un joli diablotin armé d’une échelle et d’un hérisson avec le message : « Faites ramoner vos cheminées. » Et tout le monde comprenait « voici Noël qui approche ». À peu près au même moment, un deuxième indice venait confirmer le premier quand, à l’église, l’orgue attaquait les premières notes de Venez divin Messie. C’était un bonheur sans pareil. On entrait dans l’Avent. Alors enfin, le dimanche suivant, maman sortait une boîte à chaussures vide, et toute la famille prenait la direction du bois pour trouver de quoi faire une belle crèche. Puis Noël arrivait. J’étais contente, bien sûr, mais c’est l’Avent qui m’a le plus marquée. Et quand par hasard un organiste improvise des variations sur ce fameux Venez divin Messie, je me sens frémir encore. » Monique

→ COMPRENDRE. D’où vient la crèche de Noël ?

♦ « Ce jour de Noël 1942, nous sommes allés à la messe de minuit en famille et avec des voisins à pied. Nous partîmes du hameau de Hyelzas (Lozère) vers 20 h 30, dans la nuit obscure et un vent très froid, chaussés de sabots munis d’une empeigne pour ne pas les perdre en marchant. Une lanterne éclairait un peu notre route parfois enneigée, mais le froid glaçait les mains. Arrivés à La Parade vers 21 h 30, nous sommes allés chez une veuve pour passer la veillée jusqu’à minuit, heure de la messe qui était suivie par deux autres messes basses par le prêtre. Pas d’électricité, pas de chauffage. La communion n’était donnée que si on avait mangé la veille, c’était ainsi. Au retour, il faisait encore plus froid. Nous les jeunes, nous ne tenions pas le coup mais il fallait tenir. Nous arrivâmes vers 2 h 30. Nous pensions voir le Père Noël. Mais il n’était pas encore passé. Forcés d’aller au lit, peut-être après avoir mangé une pomme ou un morceau de pain avec du sucre. C’est le matin qu’il est passé avec un cadeau bien simple, mais il y avait la joie de recevoir un peu de bonheur, une barrette de chocolat, une orange, des bonbons. » Denis Pratlong

♦ « Chez moi, on mêlait, sans se poser trop de scrupuleuses questions, le rite un peu païen du Père Noël à la fête de la Nativité. Parmi les cadeaux reçus, j’ai souvenir d’un petit appareil de projection dans lequel je pouvais passer des films en papier enduit, essentiellement des fables de La Fontaine. Comme beaucoup de garçons, j’ai aussi eu une petite carabine et ses fléchettes à ventouse. Plus inoffensive, ma maison forestière en bois trône encore sur une étagère de notre maison de campagne. En revanche, je n’ai pas eu le Meccano adulé par tant de garçons de mon âge. Et puis j’ai eu aussi ma poupée Lina, un jouet de fille, mais avec laquelle j’ai passé, sans complexe aucun, de superbes moments. Voilà qui réjouirait aujourd’hui les tenants de jouets non genrés, et toutes celles et tous ceux qui pensent, avec Simone de Beauvoir, que l’on ne naît pas femme, mais qu’on le devient par contrainte familiale et injonctions sociales… Donc, j’imagine aussi que l’on ne naît pas garçon. Ben ça alors ! » Georges Guy

♦ « Enfant, Noël était pour moi la venue des grands-parents dans un appartement exigu, et le cadeau rituel : des chaussettes tricotées par notre grand-mère et ce que nos parents glissaient dedans, une orange, une papillote, deux ou trois noix, amandes et une petite bricole pour chacun des quatre enfants. On appelait ça le cadeau « petit rien ». Par la suite, l’ordinaire s’est amélioré à la maison, et la tradition s’est perdue, bien que les cadeaux soient restés souvent utiles et modestes. Avec mon mari, nous avons remis cette tradition de mon enfance au goût du jour. Chacun de nos enfants et aujourd’hui petits-enfants reçoit chaussettes, bonnet ou gants avec les mêmes fruits secs. Nous avons aussi fait « Table ouverte » pour le petit déjeuner du 25 au matin. Ma fille aînée poursuit elle-même cette tradition. Ce « petit rien » fait aussi chaud au cœur à celui qui le prépare qu’à celui qui le reçoit. » Marie-Thérèse Guillem

♦ « C’était en 1974, j’avais 13 ans et j’étais à l’hôpital après une opération à cœur ouvert. Les infirmières ont aligné les tables des patients dans le couloir et nous avons pris le dîner du 24 décembre tous ensemble. Je me souviens du dessert : une glace rhum-raisin (ma première) ! Le lendemain, mes parents m’ont apporté une part de bûche pour le goûter. Mais ça n’avait pas le même goût, sans le reste de la famille… » Pauline

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